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Un véhicule de moins de 30 ans peut-il être un véhicule de collection ?

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Les croyances populaires sont légion en fiscalité automobile. Nous avons d’ores et déjà tenté de mettre à mal une des plus tenaces en démontrant qu’un véhicule de plus de trente ans n’est pas nécessairement un véhicule de collection (allez voir notre fiche sur les véhicules de plus de 30 ans !).

Qu’en est-il de la contraposée ? Figurez-vous qu’elle existe ! Un véhicule de moins de trente ans peut être un véhicule de collection s’il a participé à un événement historique ou s’il dispose d’un palmarès en compétition significatif

L'ESSENTIEL :

 

Sont qualifiés de véhicules de collection :

 

  • Les véhicules ayant participé à un événement historique (I) ;

 

  • les véhicules conçus, construits et utilisés exclusivement pour la compétition, possédant un palmarès sportif significatif acquis lors d’événements nationaux ou internationaux prestigieux (II). 

I.  PARTICIPATION DU VÉHICULE À UN ÉVÉNEMENT HISTORIQUE

La réglementation douanière définit le véhicule de collection comme « le véhicule automobile dont, quelle que soit la date de leur fabrication, il peut être prouvé qu’ils ont participé à un événement historique ».

Cette définition, on le rappelle, est reprise tant en matière de TVA que de taxe sur les ventes d’objets précieux. La réglementation douanière se garde en revanche bien de préciser ce qu’elle entend par « événement historique ». 

Jusqu’en 2013, la doctrine administrative relative à la taxe sur les objets précieux osait une définition :

« Tout véhicule, quel que soit son âge, présentant un caractère historique indéniable (par exemple, une voiture ayant appartenu à un personnage célèbre ou ayant participé à un événement historique) ou dont l’originalité technique a influencé le développement de l’automobile ou de la motocyclette, à condition qu’il soit présenté dans un état conforme à celui d’origine et que soit produit un mémoire technique justificatif ».

On remarque que la participation à un événement historique n’était qu’un critère parmi d’autres d’identification du véhicule de collection, l’administration fiscale distinguant par ailleurs le cas du véhicule détenu par un personnage célèbre et celui doté d’une originalité technique.

Cette définition a été supprimée lors de la mise à jour de la définition douanière

Le véhicule de moins de 30 ans ayant appartenu à un personnage célèbre est-il encore qualifié de véhicule de collection ? Le contribuable ou l’administration (selon le cas - cliquez ici pour accéder à notre fiche sur les enjeux liés à la définition de véhicule de collection), pourrait par exemple faire valoir que le véhicule ayant appartenu à un personnage célèbre a également participé à un événement historique (ex : un véhicule avec lequel un célèbre chanteur serait arrivé sur la scène d’un concert). En revanche, il n’est plus certain que la seule détention par une personne célèbre soit suffisante. 

 

Le véhicule de moins de 30 ans associé à une innovation technique est-il encore qualifié de véhicule de collection ? Notre commentaire relatif à la détention par un personnage célèbre est transposable à ce cas : peut être qualifié de véhicule de collection le véhicule ayant été mis particulièrement en avant du fait de son originalité technique (ex : véhicule ayant promu une technologie nouvelle en marge d’une compétition majeure). 

 

Qu’en est-il des véhicules ayant fait une apparition dans un film ? D’un point de vue purement textuel, ils ne devraient pas être qualifiés de véhicules de collection du seul fait de cette apparition, sauf à retenir une lecture particulièrement extensive de la notion d'événement historique. Une telle exclusion peut paraître discutable.  

 

Quid des véhicules de compétition ? Si le législateur avait entendu inclure largement les véhicules de compétition dans cette catégorie, alors il ne se serait pas donné la peine de prévoir des critères plus spécifiques (voir ci-dessous).

II.  PALMARÈS EN COMPÉTITION DU VÉHICULE

Peut également être qualifié de collection le véhicule respectant les deux conditions cumulatives suivantes : 

  • avoir été conçu, construit et utilisé exclusivement pour la compétition ;

 

  • posséder un palmarès sportif significatif acquis lors d’événements nationaux ou internationaux prestigieux.

a. Affectation exclusive à la compétition

D’une part, le véhicule doit avoir été conçu, construit et utilisé pour la compétition. L’emploi de la conjonction de coordination « et » laisse entendre que les critères de conception, de construction et d’utilisation sont cumulatifs

Quels sont les véhicules exclus ? sont exclus de facto (i) les prototypes réalisés dans le cadre de projets abandonnés ainsi que (ii) les véhicules de développement n’atteignant pas le stade de la compétition. 

D’autre part, le véhicule doit avoir été affecté exclusivement à la compétition. Si ce critère peut paraître consubstantiel à l’obtention d’un palmarès significatif (elle est bien loin l’époque où un modèle de « série » pouvait prétendre à la victoire), il scelle définitivement l’exclusion : 

  • des véhicules développés pour la compétition mais également commercialisés auprès d’une clientèle privilégiée qui n’en fait pas nécessairement une utilisation compétitive, sauf à ce que le modèle de compétition diffère substantiellement de la version client et puisse être considéré comme un modèle distinct (ex : si la version cliente n’est pas astreinte à un règlement technique) ; 

 

  • des véhicules utilisés dans le cadre de démonstrations (ex : Gymkhana, etc…).  

Quelles sont les compétitions concernées ? Le terme « compétition » est suffisamment large pour encadrer la quasi-totalité des disciplines du sport automobile (circuit, rallye, rallye-raid, contre-la-montre, drift, etc…). 

 

Le véhicule peut-il avoir été modifié postérieurement à sa carrière sportive ? Il s’agit certes d’une situation marginale. Les textes ne prévoient pas que la modification substantielle d’un véhicule de compétition puisse être de nature à altérer la qualification de collection. Nous réservons néanmoins le cas d’altérations portant atteinte à l’identité même du véhicule. 

Vous trouvez le débat trop juridique ? Alors parlons pratique ! La situation d’une Ferrari FXX K, modèle “compétition-client” ne participant, dans les faits, à aucun championnat compétitif, se distingue de celle de la Ferrari 499 P victorieuse au centenaire des 24 heures du Mans. 

 

Le propriétaire français d’une Ferrari FXX K pourra difficilement revendiquer l’exemption de droits de douane s’il l’importe des États-Unis, car il ne s’agit pas d’un véhicule de collection. En revanche, s’il décide de s’en séparer avant qu’elle n’atteigne trente ans, il ne devrait pas être imposé sur la plus-value matérialisée au moment de sa cession. 

 

Il pourrait en être différemment si le véhicule en question n’est pas une FXX K, mais le châssis de 499 P victorieux pour le centenaire des 24 heures du Mans. Il existe peu de doutes sur le fait que cette voiture est un véhicule de collection au sens du droit fiscal. 

b. Palmarès sportif significatif d'envergure nationale ou internationale

D’une part, le véhicule doit avoir acquis un palmarès sportif significatif. L’imprécision des termes laisse ici place à toutes les interprétations. 

Sémantiquement, le palmarès d’une personne ou d’une chose est défini comme une liste de succès. A notre avis, une telle définition ne devrait pas se limiter à l’obtention d’une série de victoires, mais pourrait également viser des véhicules ayant terminé sur les marches du podium, bien classés dans leur catégorie ou encore à un indice (notamment de performance ou énergétique). 

L’endurance est un terrain particulièrement propice à ce type d’argumentation, étant donné que l’objectif de ce type d’épreuve est non seulement de remporter une victoire au scratch ou de classe, mais également de montrer la fiabilité du véhicule (ex : véhicule parvenu au terme d’une course d’endurance en utilisant une technologie nouvelle). 

Quels sont les véhicules exclus ? Il devrait en pratique s’agir des véhicules (i) ayant accumulé les mauvais résultats et contre-performances, ou (ii) dont l’utilisation s’est limitée à des essais ou à un remplacement (véhicules dits « mulets »), ou (iii) des véhicules inscrits à une compétition mais n’ayant pas pris le départ, parce que ne respectant pas la réglementation technique, ou parce qu’accidentés pendant les essais (d’autant plus s’il s’agit d’essais privés).

 

Que penser de ces exclusions ?  Nous avons du mal à concevoir qu’une Jaguar ayant participé au championnat du monde de F1 ne puisse pas être considérée comme un véhicule de collection, même si elle a accumulé les mauvais résultats (à l’exception de quelques places de choix, comme à Monaco en 2001 et Monza en 2002). 

 

Il fut un temps où les pilotes ne réalisant pas un temps minimum ne pouvaient pas prendre le départ de la course. Se qualifier était donc en soi une forme de succès. 

 

Les choses se jouent désormais en amont et la performance relève plutôt de la capacité d’une écurie à atteindre un certain niveau de compétition. Quand bien même Jaguar F1 n’a jamais été compétitif, courir en catégorie reine conduit tout de même à doter le véhicule d’une certaine forme de palmarès. 

 

Cet exemple montre toutes les limites de la définition donnée par la réglementation douanière.

D’autre part, ce palmarès doit être d’envergure nationale ou internationale. L’inclusion des épreuves nationales nous paraît, au regard des autres critères, relativement généreuse puisque l’essentiel des évènements d’envergure est organisé, a minima, en application d’un règlement national (ex : FFSA). D’ailleurs, préalablement à sa modification en 2014, la doctrine administrative applicable en matière de taxe sur les ventes d’objets précieux visait uniquement les compétitions internationales. 

Ce critère a cependant pour effet d’exclure des véhicules au volant desquels se sont formées de futures gloires en participant à des championnats régionaux.  

III.  CONCLUSION

Ici plus qu’ailleurs, l’imprécision des textes est source d’insécurité juridique, ou d’opportunité, suivant votre façon d’aborder les choses. 

L’enseignement le plus essentiel reste qu’en la matière le droit fiscal colle difficilement à la pratique et qu’une étude spécifique est recommandée si vous vous portez acquéreur d’un véhicule de moins de trente ans doté d’un historique particulier. 

Textes de référence :
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